Comment une tentative d’assassinat a été déjouée en quarante-huit heures


Voilà un mois que les policiers français suivent en direct les activités des trafiquants abonnés à l’application Sky ECC, réputée inviolable, ce mercredi 24 février 2021, lorsque, noyé dans le ronron des conversations, un message attire l’attention des enquêteurs. « Salem, comment tu va ? Voilà sa avance aujourd’hui j’ai testé les calibres j’ai les voitures demain j’achète tenue. Tous dimanche je repère encore une fois ou deux met maximum etc bon je l’éclate. »

Ces deux lignes préfigurent la mise en œuvre d’un assassinat. Sur l’auteur du message, les enquêteurs ne disposent alors pas d’autres informations que le pseudonyme qu’il utilise sur le réseau Sky : un certain « LAA ». Mais l’imminence du passage à l’acte, programmé selon un autre message au lundi suivant, bouscule la surveillance consciencieuse des discussions. Il reste cinq jours pour mettre en sécurité la victime potentielle.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Sky ECC, l’application prisée des traficants, mine d’or des enquêtes sur le crime organisé

Le vendredi 27 février, l’Office central de lutte contre le crime organisé est saisi de l’enquête. Le point de départ est maigre : un projet criminel sur une victime inconnue, par un commanditaire inconnu et un exécutant inconnu.

En remontant dans la timeline de « LAA », les échanges sur ce projet criminel apparaissent dès le 11 février. Les discussions, enrichies de photos, portent clairement sur la description de la victime et l’identification de son domicile, situé dans le Val-de-Marne. Il est question de logistique et d’organisation matérielle : le test des armes, la récupération des voitures… « LAA » réalise ses repérages en fonction de l’emploi du temps de sa proie.

Au cours du week-end, la cible est identifiée, informée de l’imminence du risque encouru, et mise à l’abri. Son audition, le lundi 1er mars, corrobore les recherches antérieures : cette femme était menacée. L’environnement dans lequel elle évolue est celui de trafiquants de stupéfiants de haut niveau.

Guet-apens

D’après les informations du Monde, il s’agit là de conflits dans l’entourage de l’une des figures du narcobanditisme parisien des années 2000 : Mustapha Djilali Bloufa, plus connu sous son surnom de Ronaldo, en référence au footballeur brésilien, dont il partage l’âge et la silhouette. La femme menacée par « LAA » était une proche du trafiquant.

Ronaldo, originaire de Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise), s’était fait un nom en développant des réseaux internationaux de trafic de cannabis et de cocaïne, grâce à des contacts directs en Espagne, au Maroc, et jusqu’au Venezuela. Un temps incarcéré, il n’a guère eu le loisir de goûter à sa liberté retrouvée : quelques semaines après sa sortie de prison, au début de l’année 2020, il est la cible d’un guet-apens alors qu’il se trouve sur un parking de sa ville d’origine, au volant de sa Mercedes noire. La mort de Ronaldo, tué de plusieurs balles de kalachnikov en pleine tête, n’avait pas mis fin aux tensions avec ses ennemis. Le projet déjoué sur Sky ECC en est la preuve.

Il vous reste 22.82% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source
Catégorie article Politique

Ajouter un commentaire

Commentaires

Aucun commentaire n'a été posté pour l'instant.